Les élus de Martinique interpellés quant à leur niveau d'implication dans la crise du Coronavirus
Dernière mise à jour : 26 mars 2020
Les élus de Martinique ont été interpellés par un groupe de citoyens qui s’inquiètent de leur niveau d’implication dans la crise du Coronavirus.
Trois parlementaires, Josette Manin, Maurice Antiste et Catherine Conconne leur ont adressé la réponse suivante.
Chers compatriotes, S’il y a un regret que nous devons formuler, c’est cette posture désormais généralisée qui consiste à être en permanence dans le jugement avant même d’avoir une once d’explication des personnes interpellées. Votre courrier, hélas, en fait une fois de plus la démonstration dans ses premiers mots en qualifiant « d’impuissance »,l’action publique des élus locaux, quelle que soit leur fonction. Il est parfaitement légitime que les regards soient tournés vers les élus. Nous sommes les représentants d’un peuple qui au travers des élections libres et démocratiques a bien voulu nous accorder sa confiance. Nous faisons d’ailleurs de notre mieux pour en être à la hauteur même si les temps sont plutôt à la défiance permanente, au « ayin épi yo pies pa bon », au bashing facile pour reprendre un vocable très tendance. Les réseaux sociaux très répandus privilégient désormais l’attaque simple, facile, surtout aisément « essaimable », autour d’une déconcertante crédulité de l’opinion. Mais la réalité est tellement différente. Alors, pour ces raisons, nous oublierons volontiers les premiers mots de votre courrier, ce fameux et laconique jugement « d’impuissance » et préférerons là-aussi volontiers, aller vers la suite et les propos qui ressemblent davantage à de salutaires questionnements auxquels nous nous appliquerons à répondre. Nous militons pour notre part pour la transparence et mettons en œuvre au quotidien le compte-rendu de l’action publique du mieux que nous pouvons. Nous avons fait le choix, dans cette crise, de la sérénité et de l’action concrète. Certes, il aurait été facile de faire proliférer des vidéos-selfies qui haranguent avec une certaine aisance (et les exemples récents sont nombreux) tous ceux qui sont prêts à en découdre en pointant du doigt. C’est peut-être désormais comme cela que l’on aurait davantage une impression d’actions. Nous avons fait le choix dans cette crise d’être omniprésents là où il le fallait. Nous avons fait le choix d’écouter humblement les médecins, prendre leur avis éclairé de spécialistes tous les jours, nous inquiéter des conditions offertes par notre CHUM en proie à des difficultés chroniques. Ce positionnement est lucide, sans compromission, déterminé et en conscience. Nous osons croire que nous n’avons plus à faire la preuve de notre attachement à notre pays et de la considération que nous portons à nos compatriotes. Nous avons fait le choix d’être, malgré le confinement généralisé, mobilisables à tout moment par la cellule de crise installée il y a maintenant plus d’un mois par les services de l’État. Cette cellule de crise utilise également les moyens de communication à distance offerts par les nouvelles technologies. Nous sommes abondés régulièrement et en toute transparence d’informations. Toutes nos questions et interpellations sont immédiatement prises en compte et ce, qu’elles relèvent de problématiques de santé, de vie économique ou du quotidien très complexe de l’activité. Pour notre part, nous multiplions en dehors de ces canaux classiques, des contacts directs quotidiens avec toutes les autorités qu’il s’agisse du CHUM, de l’ARS, leur faisant part régulièrement de nos diverses interpellations qui nous remontent du terrain. Nous avons fait le choix d’être en appui permanent de toutes leurs demandes formulées au niveau national. Hier encore, l’un d’entre nous a insisté par écrit auprès du Ministère de la Santé pour que 30 respirateurs nous soient dédiés dans les commandes en cours de livraison de l’État. Nos actions de ce type sont innombrables, souvent discrètes mais très utiles. Nous constatons en tous cas, que MALGRE LE CÔTÉ INEDIT ET EXCEPTIONNEL de cet épisode de crise, la mobilisation des services publics et des associations comme la Croix Rouge est à saluer. On peut toujours souhaiter plus, on peut toujours souhaiter mieux il est vrai mais elle est à l’œuvre. Nous tenons aussi, malgré la fièvre que cela a pu déclencher, à reconnaître que notre particularité de région très concernée par la croisière a été également traitée du mieux qu’elle pouvait l’être. Nous sommes au fait des confinements opérés, aussi bien en collectif qu’à domicile, pour plus de 800 de nos compatriotes. Nous saluons au passage la solidarité des maires du Vauclin et du Morne-Vert qui, sans stigmatisation aucune, ont accompagné la mise en œuvre de ces confinements qui ont pu être organisés dans des délais record. Nous pourrions aussi saluer les autorités de la SAMAC avec qui certains d’entre nous ont pu longuement et régulièrement échanger et estimer ainsi l’importance des moyens déployés. Le sang-froid et la sérénité face à l’emballement de la population ont pu faire prospérer une gestion de cette crise et éviter ainsi un pic de catastrophe sanitaire. Des moyens importants de contacts mis en œuvre depuis avec ce public potentiellement exposé nous ont été présentés : cellule d’appels téléphoniques activée pour le contrôle des mis en quatorzaine... Tous les jours, nous sommes, à nos fonctions respectives, mis face à des situations très concrètes, très problématiques. Les maires, en particulier, doivent gérer dans la proximité des cas tous aussi différents les uns que les autres. Les uns et les autres assumons avec détermination nos responsabilités. Dès les premiers jours, nous avons été mis face au constat de pénurie de masques et de certains matériels de soins. Notre insistance a été permanente pour assurer le déstockage des réserves stratégiques constituées régulièrement dans notre région exposée aux risques naturels les plus graves. C’est chose faite et nous avons pu vérifier que malgré le pillage et le marché noir organisés par nos propres compatriotes à partir des réserves du CHUM, les approvisionnements avaient repris depuis quelques jours. Toujours côté santé, nous sommes informés de la mise à disposition des unités de soins critiques de la Clinique St Paul qui, elle aussi, a accepté de déprogrammer son exercice chirurgical classique pour se mettre en mode « crise ». Pour l’instant, et en chiffre constant depuis 3 jours, 7 personnes sont prises en charge par les services de réanimation du seul CHUM. 89 places de soins critiques sont à disposition dans ce même CHUM. La vie parlementaire ne s’est, elle non plus, pas arrêtée. Nous avons assuré via nos groupes politiques, nuit et jour, une permanence vigilante et des remontées quant aux différentes lois qui ont été votées depuis ce dimanche. L’action quotidienne nous conduit également à nous assurer du bon suivi des prises en charge et éventuels rapatriements de nos compatriotes qui se trouvent aujourd’hui dans différents pays du monde. De nombreux Martiniquais, résidents ou touristes, nous interpellent tous les jours sur leur situation et nous menons des négociations régulières avec les services du Quai d’Orsay. Hier encore des Martiniquais en croisière depuis 2 semaines dans la Méditerranée et en proie à de véritables angoisses ont fait l’objet de signalements appuyés et suivis auprès des différents ministères. Concernant les différentes thérapies proposées depuis plusieurs jours face à ce désastre mondial, nous suivons de près les travaux menés, les conclusions des instances officielles comme l’OMS. Face à la science et, plus particulièrement, la médecine, nous adoptons toujours l’attitude humble de ceux qui ne savent pas. C’est notre doctrine, celle qui réserve ce débat complexe aux seuls spécialistes de la question. Nous observons et restons vigilants face aux différents questionnements et veillerons bien sûr à leur application la plus rapide dans notre pays en cas de conclusion positive sur l’efficacité de tel ou tel traitement. Le politique n’est pas un soignant malgré tous les pouvoirs qu’on pourrait lui prêter et nous ne nous permettrons jamais de nous substituer à ceux dont c’est le métier. Une bonne organisation sociale réclame que chacun soit et reste, en toute humilité, à sa place. La mise en commun respectueuse des forces des uns et des autres, chacun dans sa spécialité, reste et demeurera le cœur de notre action. Nous pensons avoir pu ainsi répondre à l’essentiel de vos questions. Nous nous y sommes attelés respectueusement sans stigmatisation aucune. Tout, oui, peut être toujours plus que parfait, c’est vrai. Nous croyons surtout que tout peut être amélioré au quotidien par les apports concrets et solidaires des uns et des autres. Face à cette crise, nous exerçons une vigilance de tous les moments, de tous les instants, nuit et jour. Nous n’hésitons pas à prendre notre plume dans la plus grande pertinence quand le devoir lucide et conscient nous appelle à le faire. Nous restons aussi ouverts aux avis et informations crédibles qui sont portés à notre connaissance au quotidien, en exerçant notre pouvoir de contradiction, nos exigences de précision et de transparence. Notre curiosité naturelle nous pousse à tout vérifier, à nous enrichir d’avis contraires et divers pour parvenir à des synthèses conscientes. Enfin, certains d’entre nous tiennent informés les élus locaux, les socio-professionnels, la presse, et les forces vives du pays de toutes les initiatives prises via leurs réseaux sociaux et leur fichier de mails. Nous demeurons, bien sûr, à votre disposition, individuellement et collectivement par tous moyens que vous jugeriez opportun par cette époque de confinement pour d’autres précisions utiles. Nous avons l’habitude de croire que nul n’a le monopole de l’amour du peuple. C’est ainsi que nous avons envie de vous inviter à croire en toute solidarité à notre mobilisation sans faille auprès des nôtres que nous avons choisi d’accompagner dans cet exercice démocratique difficile mais tellement passionnant. Prenez soin de vous et de tous et toutes. Cordialement, Catherine Conconne Sénatrice de Martinique Maurice Antiste Sénateur de Martinique Josette Manin Députée de Martinique
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